L’influence du rap au grand écran
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L’influence du rap au grand écran

L’influence du rap au grand écran

Par AdélaïdeAdélaïde

Au-delà d'un genre musical, le rap c’est un univers à part entière. Cet univers a transcendé les frontières et a largement envahi le grand écran. Les bandes originales sont l'une des façons les plus significatives de voir la manière dont le rap a marqué le cinéma, en apportant originalité et authenticité à de nombreuses productions.

I - Les bandes originales au cinéma :

Très tôt, des films emblématiques comme le culte Do the Right Thing (1989) de Spike Lee ou encore le génial Wild Style (1982) de Charlie Ahearn, présentaient une bande originale composée de musiques rap. Les paroles brutes, souvent très politisées, ont apporté une dimension sociale aux films : le rap a établi un dialogue entre les images et le public. S'il est aussi efficace au cinéma, c'est grâce à sa capacité à raconter des histoires, il se façonne comme une véritable arme narrative. Plus rien à prouver : il transmet des émotions, des expériences, des messages forts, et il le fait même très bien. Utilisées de manière stratégique dans un film, les bandes originales plongent le spectateur dans l'ambiance, rendant l'expérience encore plus immersive.

Bande Annonce Do the right thing, (1989), Spike Lee

Un exemple connu de tous lorsque l'on veut parler de l'utilisation réussie du rap au cinéma, c’est bien évidemment le classique 8 Mile (2002) de Curtis Hanson, dans lequel Eminem aka Slim Shady joue le rôle principal. C’est l’un des films les plus cultes, si ce n’est LE plus culte, pour tout passionné de rap. Il reprend des morceaux absolument saisissants - sans citer Lose Yourself - interprétés par Eminem lui-même. Cette B-O phénoménale amène le spectateur à se plonger au cœur du film.

Justement, dans la scène d’exposition du film, on y voit Jimmy (le rôle principal joué par Eminem), répéter dans le miroir des toilettes sur Shook Ones de Mobb Deep – un des groupes les plus légendaires de l’histoire du rap US - avant son battle. Par ce clin d'œil, l’intensité de la scène est renforcée et l’on se retrouve immergé au plus profond de la conscience du personnage.

Scène d’ouverture 8 Mile, (2002), Curtis Hanson

En France, c'est la scène culte du film La Haine de Mathieu Kassovitz (2005) qui a marqué notre esprit. Interprétant son propre rôle, le DJ Cut Killer règne en maître sur la cité lorsqu'il commence à faire chauffer les platines en mixant le titre Sound of da police de KRS-One avec Police du groupe NTM et l'iconique Je ne regrette rien d'Édith Piaf. Un cocktail explosif, qui transforme la ville en une véritable scène de concert. Kassovitz l'a bien compris, le rap ce n'est pas juste de la musique, c'est une arme. La haine retranscrite au micro, ce mélange de sons résonne comme un cri de révolte, un hymne à la résistance.

Extrait séquence de Dj Cut Killer, La haine, (2OO5), Mathieu Kassovitz

Il existe d'autres collaborations entre rap et cinéma présentent dans l’œuvre francophone, c'est notamment le cas avec le film Tueurs réalisé par François Troukens et Jean-François Hensgens, sorti en 2017. Il a d'ailleurs été présenté à la Mostra de Venise 2017. Animalsons (duo de producteurs et beatmakers, de Booba ou La Fouine) signe la musique de ce thriller belge, qui se conclut sur le célèbre morceau homonyme, Tueurs, de Damso.

TH, Prince Waly ou encore Josman, c’est la saison 2 de la série En Place, réalisée par Jean-Pascal Zadi et François Uzan, qui frappe fort avec une B-O presque entièrement rap, pour notre plus grand plaisir.

De retour aux US, des artistes comme Kendrick Lamar ou Post Malone ont également contribué à créer des bandes originales pour des films, comme pour Black Panter (2018) qu'on ne présente plus, ou encore pour Spider-Man: Into the Spider-Verse de la même année, tous deux salués par le public. Preuve, s’il en fallait une, que le rap et le 7e art forment un duo plus qu'efficace. Pour autant, la musique n’est pas le seul moyen d’expression pour raconter et faire part d’une histoire.

II - Les rappeurs devenus acteurs :

Les rappeurs ont aussi pris le chemin du grand écran, et au-delà des textes et de la musique, ont su montrer au monde qui ils sont.

Un des premiers rappeurs à avoir réussi cette transition vers une carrière d'acteur, n'est autre que l’OG du rap US, le légendaire Ice Cube. Ayant fait ses débuts en tant que membre du groupe emblématique N.W.A., Ice Cube s'est rapidement imposé comme une figure plus que marquante du mouvement West Coast. Il a parfaitement trouvé sa place dans le cinéma, notamment avec des rôles dans des films comme Boyz n the Hood, le fameux film dramatique américain qu’on ne présente plus, réalisé par John Singleton et sorti en 1991. Il a d’ailleurs été nommé aux Oscars pour les catégories meilleur réalisateur et meilleur scénario.

Scène de fermeture Boyz n the Hood (1991), John Singleton

En France, des artistes ont aussi accédé au statut d’acteur. On cite évidemment le rappeur et lyriciste Kery James avec le film Banlieusard, co-écrit par Leïla Sy et lui-même. Le film traite des convictions et ambitions tiraillées de jeunes de cité en banlieue parisienne. Kery James se met lui-même en scène pour incarner le rôle de Demba, le grand frère dealeur, à deux doigts de la prison. La performance est plus que réussie et il parvient facilement à nous transmettre des émotions. Loin des préjugés, son regard est aussi bien critique envers la banlieue qu’envers l’État. Il se refuse au déterminisme. Parce qu’il sait de quoi il parle, Kery James reste pertinent et ne tombe pas dans les clichés.

Non seulement maîtres des mots, nombreux sont les rappeurs qui ont su passer devant la caméra. Fianso en est un exemple type, on a pu le voir apparaître dans le film Sous emprise (2022) produit par Netflix, ou plus récemment dans Barbès, little Algérie, réalisé par Hassan Guerrar. Il a su se défaire de son personnage de rappeur pour incarner des rôles loin des stéréotypes, et tout cela pour notre plus grand plaisir. L'artiste semble vouloir pérenniser sa carrière d'acteur.

La scène française n'en est donc pas à son coup d'essai : Joey Starr dans Polisse, Disiz avec Dans tes rêves ou encore MHD dans le film Mon frère. Dernièrement, en 2020, c'est la série Validé qui a fait parler d'elle. Plus ou moins bien accueillie, la série a fait appel à Hatik pour incarner le personnage principal, Apash, un jeune rappeur prometteur. C'est la première série française ayant comme thème principal l'industrie musicale, et plus particulièrement la scène rap.

Bande Annonce Barbès, Little Algérie, (2024), Hassan Guerrar.

III - Le 7ème art comme inspiration :

Cinéma et musique vivent en parfaite symbiose, et n'hésitent pas à s'inspirer mutuellement. C'est donc assez facilement que l'on retrouve des textes de rap aux inspirations venues tout droit du 7e art.

Comment passer à côté d'une des œuvres les plus emblématiques du cinéma contemporain et de son légendaire protagoniste Tony Montana : on parle là bien évidemment de Scarface, l’œuvre mythique de Brian de Palma.

Sans citer le classique de Booba, nous avons aussi Plus Tony que Sosa de PNL, qui fait directement référence aux deux grands ennemis du film. Plus évident encore, l'album Le Monde Chico, un game-changer du rap français, certifié triple disque de platine, s’inspire d’une des répliques mythique du long-métrage, « Le monde, Chico, et tout ce qu'il y a dedans. ».

Plus Tony que Sosa, PNL - Clip officiel, 2015.

Serait-ce possible de citer rap et cinéma dans la même phrase en omettant un classico del classico ?? Impossible de ne pas mentionner La cité de Dieu lorsque l’on parle des inspirations du rap français. Sorti en 2003 et réalisé par Fernando Meirelles et Katia Lund, ce chef d’œuvre franco-germano-brésilien n'a cessé et ne cesse d'inspirer la scène rap. Entre l’apparition de Leondro Firmino, l'acteur qui incarne Zé Pequeno dans le clip du morceau Zone international de Rohff ou dans celui de Booba pour Au bout des rêves, jusque dans le court-métrage de Sadek, intitulé justement Zepek, les références au duo mythique - Bene et Zé Pequeno - sont infinies. De la cover de l'album de Sasso, Enfant2LaRue Vol.1, à la référence au début du couplet de La vie qu'on mène de N.I, impossible en tant qu'auditeurs de rap de passer à côté !

Au bout des rêves, Booba - Clip officiel, 2008.

« J’me sens comme De Niro dans Casino » : Martin Scorsese n’est pas mis de côté lui non plus, avec le joli clin d'œil dans Torino de Hamza. Plus récemment, on peut penser à l'artiste LUMJR qui a littéralement appelé son dernier EP Casino, pour faire suite au précédent intitulé Loterie.

IV - Conclusion :

Bien que cinéma et musique fassent bon ménage, il est crucial de faire preuve de discernement : en effet, la présence de certains rappeurs au casting peut parfois s'expliquer de par leur popularité, pour faire profiter le film d'un tremplin médiatique. Car oui, le rap est le premier genre écouté en France, et ça, le cinéma l'a bien compris. Certains rappeurs se retrouvent donc parfois devant la caméra en tant que « produit d'appel », pour faire vendre et non pour revendiquer leur art.

En bref, les raisons de cette transition - qui pour autant ne remettent pas en cause la continuité de leur carrière d’artiste - sont compréhensibles. D’abord, parce que le cinéma permet d’explorer de nouvelles manières de transmettre. L’expérience du grand écran est différente de l’expérience classique de la scène et du studio, elle ouvre de nouvelles perspectives. Par la voie des films, les rappeurs peuvent aussi élargir leur empreinte médiatique et toucher un public différent.

Pour conclure, le rap continue d'inspirer et de façonner l'industrie cinématographique et vice-versa. La transition réussie de nombreux rappeurs vers le cinéma illustre bien la profondeur de cette influence. Le mouvement reste un puissant catalyseur de créativité et de diversité artistique, que ce soit sur scène ou à l'écran. Il est la pierre angulaire d’une culture qui résonne partout dans le monde, et qui n’a pas fini de faire parler d'elle !

PLAYLIST :

Fight to power – Public Enemy

Natural born killaz – Ice cube, Dr. Dre

Lose yourself – Eminem

Shook ones, pt.II – Mobb Depp

Gotta get mine – MC Breed

Sound of da police - KRS-One

Police – NTM

La 25e image – IAM ft Nuttea

Marseille la nuit - IAM

Tueurs – Damso

MP5 - Prince Waly

Eurostar - TH

Ailleurs - Josman

All the stars – Kendrick Lamar ft SZA

The ways – Khalid ft Swae Lee

Banlieusards – Kery James

Lettre à la république – Kery James

On n'a pas fini – Mafia K'1 Fry

Grammes – Rémy ft Larry

TKT – S.pri Noir ft Joé Dwèt Filé

Scarface - Booba

Plus Tony Que Sosa - PNL

Naha - PNL

Priez pour nous - Gradur

Magnum - Kaaris

Carbozo - Ninho

Tmax 530 - Maes

M.I.L.S 2.0 - Ninho

Grand bain - Dadju feat Ninho

Zone international - Rohff

Au bout des rêves - Booba

Manu le coq – Niska

Bene Bene - PNL

La vie qu'on mène - Ninho

Torino – Hamza

Casino – Ateyaba

LUMJR – JAZZY

LUMJR – BAG

Demain c’est loin - Orelsan

En passant pécho - B-O de Kore

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