Visages Lettrés : L’ouvrage qui raconte l’histoire du rap en portraits
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Visages Lettrés : L’ouvrage qui raconte l’histoire du rap en portraits

Visages Lettrés : L’ouvrage qui raconte l’histoire du rap en portraits

Écrit par : KenanKenan

Transformer les noms de rappeurs francophones en œuvres d’art : c’est le défi que s’est lancé Sébastien Le Gall, designer graphique et typographe. Depuis 10 ans, il dessine le visage des rappeurs en écrivant leur nom à l’encre noire, puis part à la rencontre des artistes pour leur remettre leur portrait. Aujourd’hui, il publie un ouvrage qui retrace l’histoire du rap francophone par l’intermédiaire de 500 portraits. Le livre, intitulé Visages Lettrés, rend hommage à ce mouvement.

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Salut Sébastien, tu sors un projet né d'un rassemblement de deux passions : le hip-hop et la typographie. Laquelle de ces deux passions est entrée dans ta vie en première ?

C’est le hip-hop ! Fin 2006, j’ai eu des coups de cœur pour Soprano, Sniper et Sefyu. Puis, ça s’est développé avec La Fouine et Youssoupha notamment, qui sortaient beaucoup de projets entre 2009 et 2012. Je me suis fait attraper par la musique en elle-même, mais aussi par les mots.

Et cette passion pour la lettre et l'écriture manuscrite, elle vient d’où alors ?

Entre 2011 et 2012, j’ai découvert la calligraphie. Je suis tombé en amour pour ça. Quand tu es à l’école, tu as facilement un stylo dans la main, une feuille et un peu d’ennui. Je me suis amusé à esquisser des lettres. C’est un truc qui m’a poursuivi pas mal de temps, j’en ai fait mon domaine et je me suis spécialisé.

Tu te rappelles du moment où tu as dessiné ton premier “visage lettré”, comment ça s'est fait ?

Tout part d’un soir d’ennui, sur une table à manger. Ce soir-là, je me suis mis à questionner le visage dans sa globalité et je me suis demandé comment je pourrais assembler mes 2 passions : le hip-hop et la lettre. J’ai fait un premier portrait, celui de Blacko (Sniper). Par la suite, j’ai pu le rencontrer pour lui remettre ce portrait. Son retour et celui de mes proches étaient positifs. Ça me plaisait aussi, donc j’en ai fait un deuxième, un troisième, puis ça a commencé à s’accumuler.

Comment tu t’y prends pour réaliser un portrait ?

Je cherche une photo, de préférence avec un angle de tête en 3/4 pour qu’on puisse bien voir les contours du visage. Je peux aussi fusionner plusieurs photos, comme un puzzle. Ensuite, je fais une matrice au crayon gris pour délimiter les zones de barbe et d’oreilles notamment. Et, après ça, c’est du one shot, au stylo noir directement. Donc, s’il y a des choses que je dois gommer, comme je ne peux pas gommer, il faut que je recommence.

Ça doit te prendre un temps fou ! Combien de temps tu mets pour dessiner un portrait ?

Généralement, je dessine sur un format A3 donc je mets entre 2 et 3 heures par portrait. Bien sûr, ça dépend des visages. Entre Rim’K et Kaaris, je vais mettre plus de temps à faire le portrait de Kaaris, car je vais devoir passer du temps à faire le remplissage de sa barbe.

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Par quelle partie du visage tu termines tes portraits ?

Le dernier truc que je fais sur un portrait, c’est de dessiner les pupilles. Parfois, juste avant de dessiner les pupilles, je me dis que le dessin est très ressemblant et que les traits du visage sont bien tirés. Puis, après avoir dessiné les pupilles, ce n’est plus du tout la même personne.

Est-ce qu’il y a des visages plus durs à dessiner que d’autres ?

Les visages les plus durs à dessiner sont ceux des femmes. Un trait en trop sur un portrait d’homme peut s’apparenter à un poil en trop ou une barbe naissante. Sur une femme, il faut être sûr de ses traits.

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Une fois le portrait terminé, tu pars à la rencontre de l’artiste pour le lui remettre. Tu as rencontré près de 300 rappeurs ! Y a-t-il des retours, de leur part, qui t'ont particulièrement touché ?

Le premier qui me vient en tête est Jewel Usain, l’échange avait duré pas mal de temps. Il a un esprit très artistique, lié à sa musique sûrement. On a beaucoup échangé sur l’art des mots. Ça s’est très bien passé aussi avec Tuerie, qui était très intéressé et touché par mon travail. Je garde également un bon souvenir de ma rencontre avec Ichon. Quand je suis allé le voir, il y avait plein de monde autour de nous. Dès que j’ai commencé à lui expliquer mon projet, il m’a coupé et m’a proposé d’aller dans un endroit calme pour que l’on puisse échanger. Il a donné beaucoup de considération à mon travail.

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Tu donnes le portrait original aux artistes ?

Au début, je donnais les originaux. Puis, quand j’ai fait ma première exposition, je me suis rendu compte que je n’avais plus assez de portraits. Donc, j’ai dû refaire certains que j’avais donnés. Pendant le confinement, j’ai réalisé beaucoup de portraits, mais il n’y avait plus de concerts, donc je ne pouvais plus aller donner mes portraits aux artistes. Je les ai accumulés, et quand j’ai vu la pile de papier, j’ai commencé à scanner chaque portrait. Ensuite, je faisais faire des tirages pour les artistes que j’allais rencontrer. C’est depuis le confinement que je me garde les originaux.

Quand tu commences à compiler les portraits, tu t’imagines tout de suite que ça prendra la forme d’un livre ?

Le livre a été une évidence pour moi, mais ma conception du livre a beaucoup évolué. Au début, j’imaginais un catalogue de dessin. Aujourd’hui, il y a une vraie mise en page, des photos et un récit qui accompagne les portraits. L’objet est beaucoup plus beau et abouti aujourd’hui que si je l’avais fait en 2017, quand j’en ai eu l’idée pour la première fois.

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Pour aboutir à ce livre, tu t’es entouré de Raphaël Da Cruz, Ismaël Mereghetti et Ouafae Mameche Belabbes. Pourquoi est-ce avec eux que tu choisis de monter ton projet ?

C’était significatif pour moi, ils représentent ce que je me souhaite en tant que carrière : faire les choses en âme et conscience, sans forcement faire de concession, et faire les choses avec le cœur. C’est un peu des modèles en fait. Pour la préface, je ne voyais que Raphaël. Je me sens très proche de lui dans ses références, dans sa manière de raconter et d’expliquer. Ismaël, avec qui j’ai écrit le récit, je le connaissais d’avant. Donc, c’était facile de travailler avec lui. Et Ouafae, j’avais déjà échangé plusieurs fois avec elle sur l’industrie et les métiers qui entourent la musique. J’étais allé la voir lors de plusieurs conférences qu’elle avait données.

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Dans quel ordre sont rangés les portraits dans le livre ?

Ça a été une grande question. Je voulais les mettre par ordre chronologique. Au final, c’est le récit qui a décidé de ça. À chaque fois que je citais ou que je parlais d’un rappeur, il fallait que le portrait vienne l’illustrer. Grâce au récit, dans le livre, il y a une page sur laquelle il y a Sameer Ahmad, NeS et Laylow. J’ai essayé de représenter des artistes de toutes les époques, de tous les styles, et d’expositions différentes. Il y a des artistes qui n’ont pas de portraits, comme Kekra et Ziak, car on ne voit pas leur visage. Mais je les ai quand même cités dans le récit.

On remarque que la couverture du livre est très travaillée et qu’il y a eu une réflexion autour de la reliure choisie. As-tu pensé le livre comme un objet de collection ?

Étant un amoureux du papier, un graphiste et un typographe, je ne pouvais que bien travailler mon projet. Je me suis mis à chercher ce que je voulais mettre en avant et comment façonner le livre. C’est à ce moment que ça a commencé à devenir un objet, car j’avais des critères précis. Je voulais un objet qui se conserve dans le temps. Il y a eu un long questionnement sur la couverture, car je ne voulais pas mettre un artiste en avant. Ça aurait été injuste pour les autres.

Tu as lancé une campagne de financement participatif, via laquelle il est possible de précommander l’ouvrage. Tu as déjà fait des expositions dans le passé, est-ce que tu envisages d’en refaire après la sortie du livre ?

Ce sont des choses que j’aimerais refaire, notamment pour fêter la sortie du livre. J’aimerais exposer dans une galerie et créer un lieu de rencontre autour de ce projet. C’est encore en chantier, ce ne sont que des idées dans ma tête pour l’instant.

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Pour finir, si tu devais dessiner le “visage lettré” d’une personnalité hors du rap, puis la rencontrer pour le lui remettre, tu choisirais qui ?

Je pense que je dirais Bob Marley, pour le message qu'il a toujours véhiculé, sa façon de vivre et de penser. Mais dans le fond, je suis tellement un amoureux du rap que je t'aurais répondu DMX à cette question !

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